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Au Pérou, le pétrolier français Perenco veut continuer d'exploiter des terres indigènes


Le pétrolier Perenco, l'une des compagnies pétrolières les plus polluantes et les moins respectueuses des populations indigènes, veut exploiter le sol d’un territoire indigène péruvien par tous les moyens. 

« Le pétrole reste une aventure », clame le slogan de Perenco. Moins connu que TotalÉnergies, Perrodo Energy Company, alias Perenco, est le deuxième pétrolier français. Sa spécialité : racheter les puits en fin de vie pour en racler les dernières gouttes d’hydrocarbure à moindre coût. Un commerce dans lequel la compagnie s’est taillé une sordide réputation. 
Au cours des vingt dernières années, la société a été accusée de graves atteintes aux droits humains : menaces, enlèvements de syndicalistes et de militants écologistes, exécutions sommaires via des groupes paramilitaires… Ces actions se doublent de lourdes atteintes à l’environnement, en particulier des fuites d’hydrocarbure. Ces méthodes ont été observées en Colombie, et en République démocratique du Congo, au Gabon, au Guatemala… Et aujourd’hui, au Pérou.

Perenco y détient 50 % du bloc 67 du bassin de Marañón, situé dans le nord-est du pays. Le gisement recèle 200 millions de barils, exploités depuis 2013. « Le plan de développement comprend le forage de près de 200 puits d’architecture déviée et horizontale, à partir de dix-huit plateformes à empreinte minimale et l’extension des installations de traitement, est-il expliqué sur le site web de la compagnie pétrolière. Un pipeline d’exportation enterré pour relier le pipeline existant de Nor Peruano à Andoas, à 200 kilomètres au sud-est du bloc 67, complète cette installation. » Mais ce gisement est situé sur une terre que le gouvernement péruvien est sur le point de sacraliser : des populations indigènes, sans contact avec la société industrialisée, l’habitent. Ces peuples isolés sont particulièrement vulnérables aux maladies et risquent de disparaître au contact d’ouvriers porteurs de virus inconnus de leur système immunitaire.
Perenco nie l’existence de ces peuples.

La commission multisectorielle du Pérou sur les Piaci (« peuples indigènes en isolement et contact initial ») a approuvé le 25 juillet l’étude préliminaire de reconnaissance de la réserve indigène de Napo Tigre. Une avancée majeure pour les ONG locales, dont la demande de création de réserve date de 2003. « Avec l’approbation de cette étude, l’existence de peuples autochtones isolés qui habitent ce territoire est officiellement reconnue », s’est réjouie l’ONG Amazon Sacred Headwaters.

Las, Perenco ne l’entend pas de cette oreille. Auprès de Reporterre, l’attaché de presse de l’entreprise nie la présence de ces peuples : « En ce qui concerne les “tribus non contactées”, il y a eu récemment un certain nombre de rapports inexacts et trompeurs. L’état d’avancement de la procédure de création de la réserve de Napo Tigre est encore à un stade précoce et d’autres études sont nécessaires pour confirmer l’existence du Piaci. »

La reconnaissance gouvernementale du projet de réserve pouvant mettre à mal ses projets, le pétrolier a donc intenté en mai une action en justice contre le ministère péruvien de la Culture. « En vertu de la loi péruvienne, Perenco devrait être inclus dans l’évaluation de l’affaire Piaci, ce qui ne s’est pas produit. C’est pour cette raison que nous avons déposé une plainte demandant que la procédure actuelle soit annulée et remplacée par une procédure légale », se justifie l’entreprise. La première audience est prévue le 7 septembre. Le début d’une nouvelle aventure (judiciaire) pour la compagnie pétrolière ?…
M. Kerinec
Illustration : exploitation pétrolière en pays waorani

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