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Equateur : les communautés face aux plantations de palmiers à huile

Les plantations de palmiers à huile couvrent actuellement 270 000 hectares en Équateur, la région d’Esmeraldas étant celle qui connaît la plus forte concentration. Les processus de résistance en cours des communautés de La Chiquita, de Guadualito et de Barranquilla de San Javier continuent de susciter l’indignation et la solidarité entre les peuples et au plan international.

L’Équateur est le quatrième producteur d’huile de palme brute en Amérique latine. Les plantations de palmiers à huile y couvrent presque 300 000 hectares. Derrière ces chiffres se cache une histoire d’appropriation des terres et de violations des droits.
 
Les premières plantations de palmiers à huile sont apparues sur la côte centrale du pays. En raison des niveaux de précipitations et de températures, la meilleure zone de production se situait entre Quinindé et La Concordia. Cette zone est connue sous le nom de « bloc occidental » et représentait en 2005 83 % de la superficie totale de palmiers à huile, la plus grande production se trouvant à Quinindé, dans la province d’Esmeraldas.
 
Parallèlement, en 1978, deux grandes entreprises de palmiers à huile ont reçu des titres de propriété de 10 000 hectares chacune de la part de l’Institut équatorien de la réforme agraire et de la colonisation (IERAC) en Amazonie équatorienne, dans les provinces d’Orellana et de Sucumbíos. Les propriétaires fonciers ont ignoré la présence des peuples autochtones Quichua et Siona-Secoya et leurs utilisations des forêts. Cependant, lors du recensement réalisé en 2005 sur l’huile de palme, 15 187 hectares de palmiers ont été recensés dans le « bloc oriental. » Cela suggère qu’au moment du recensement, les 20 000 hectares octroyés n’étaient pas entièrement plantés.
 
La grande expansion des plantations de palmiers a commencé vers 1998, dans l’extrême nord de la province d’Esmeraldas, dans une zone connue sous le nom de San Lorenzo, qui fait partie de la biorégion du Chocó, qui s’étend du Panama à l’Équateur. L’épuisement des sols dans les autres régions aurait attiré les investisseurs. Il était moins coûteux pour les producteurs de palmiers d’acheter de nouvelles terres que d’essayer de récupérer les terres appauvries par la monoculture de palmiers. Le nord d’Esmeraldas offrait un bon sol, un climat idéal et une main-d’œuvre bon marché.
 
Dans ce processus d’expansion, le rôle de l’État a consisté à faciliter l’accès des entreprises à la terre, soit en autorisant des changements dans l’utilisation des terres, en procédant à des adjudications directes ou en ignorant la propriété ancestrale des terres et, au cours de la dernière décennie, en offrant des mesures incitatives et des crédits pour l’établissement de plantations. La loi sur la réforme agraire des années 1960 a encouragé ce processus. Si une personne voulait que l’État lui accorde le titre foncier d’une ferme sur laquelle elle avait vécu pendant des années, elle devait démontrer qu’il s’agissait d’une ferme productive, ou d’une ferme en jachère potentiellement productive. Pour le démontrer, il fallait qu’au moins 50 % de la terre en question soit déboisée. Cette politique a eu pour effet d’encourager la déforestation dans le pays.
 
À partir de 2000, les autorités ont commencé à introduire des mesures incitatives et des politiques publiques pour encourager l’expansion du palmier. En particulier, le décret exécutif n° 2691 sur le changement d’affectation des terres que l’ancien président Gustavo Noboa a promulgué en 2002 qui indiquait que 50 000 hectares de la forêt du Chocó deviendraient des terres agricoles, a incité les entreprises de bois et d’huile de palme à installer leurs plantations sur des terres autochtones, paysannes et afro-équatoriennes que l’État considérait comme des « terres incultes. »
 
À partir de 2003, les entreprises Palmeras del Pacifico et Energy & Palm ont commencé à acheter des terres au sein des territoires communaux, en violation de la constitution de 1998, de la loi foncière, de la convention 169 de l’OIT et d’autres traités internationaux relatifs aux territoires et aux droits collectifs.
 
La stratégie des entreprises consistait à approcher les particuliers dans les communes pour acheter leurs terres. À ce moment-là, un avocat d’entreprise effectuait les démarches correspondantes auprès de l’INDA (Institut national de développement agraire) afin que des titres fonciers individuels soient accordés, faisant fi de l’organisation collective des terres. Cette même stratégie a été appliquée aux territoires collectifs reconnus, car l’État, en violation de la Convention 169 de l’OIT, n’a pas, à ce jour, établi de cadastre des territoires collectifs pour garantir leurs droits. Ce sont ces accords individuels qui, ensemble, ont permis aux entreprises d’acquérir de grandes étendues de terre.
 
De même, la nouvelle loi de promotion du palmier africain, rédigée par l’agro-industrie et pour les producteurs de palmiers, ignore les communautés et la nature.
 
L’Équateur compte actuellement 270 000 hectares de plantations de palmiers à huile, la région d’Esmeraldas étant celle qui connaît la plus grande superficie, avec 118 000 hectares. Sur le total d’environ 500 000 tonnes produites par année en Équateur, la moitié est destinée à l’usage interne et l’autre moitié est exportée vers l’Union européenne et des pays de la région comme le Mexique et la Colombie.
 
La planification de l’expansion future se concentre sur la région amazonienne, où la déforestation a préparé le terrain pour l’arrivée des producteurs de palmes...
WRM et Acción Ecológica, Équateur

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